Comme le flacon de Chanel N ^o 5, le briquet Bic ne change pas. Ou si peu. Jamais démodé donc. Sa forme ovale et plate pour une prise en main aisée en fait, depuis quarante ans, un objet rassurant car immuable (quoique jetable). Elle lui vaut d’avoir rejoint les collections permanentes du musée d’Art moderne de New York et du Centre Pompidou.

Dans les pays développés, la stigmatisation du tabac ne s’est pas traduite par un ralentissement des ventes. Au contraire, explique Billy Salha, « general manager » pour le Vieux Continent des produits grand public. « En Europe, elles ne cessent de progresser, de l’ordre de 5 % par an, signe que nous gagnons des parts de marché », dit-il. Un sujet sensible depuis que Bruno Bich, le président du conseil de surveillance du groupe est parti en guerre contre les importations de briquets asiatiques réputés dangereux car trop souvent non conformes à la législation européenne. Alors que, aux Etats-Unis, la marque représente près des deux tiers du marché, elle n’arrive qu’à 30 % en Europe. Cherchez l’erreur.« L’Union européenne multiplie les normes qu’elle n’est pas en mesure de faire respecter »,déplore le dirigeant. Dans les pays émergents, comme le Brésil, l’arrivée de millions de nouveaux consommateurs porte les ventes de Bic « grâce à l’effet de substitution des allumettes par le briquet », ajoute-t-il. Mais, partout et de plus en plus aussi, le Bic, surtout dans sa version XL Megalighter à manche flexible, sert à allumer les barbecues, les cheminées et les bougies parfumées.

Bien dans son époque, et comme les marques pointues de mode ou de luxe, c’est avec un « pop up store » parisien dans le quartier bobo du Marais, que le briquet Bic va souffler ses 40 bougies. Pendant une semaine (du 23 mai au 2 juin) on pourra au choix personnaliser (de sa photo) son briquet, déguster des « cup cakes » orange, se faire une manucure assortie à la couleur de son briquet (on a le choix entre 24). La marque multiplie aussi les séries limitées (une centaine chaque année), qui représentent un quart des ventes. Indispensable par exemple en soirée, le briquet sur lequel on inscrit son numéro de téléphone… Pour la deuxième fois cette année, Bic a fait appel au talent des internautes de 13 pays européens qui ont participé au concours « design on fire ». Les gagnants 2013, les suédois de Nosdesignsthlm, verront leur décor imprimé à un million d’exemplaires.

Impossible de ne pas faire partie de l’événement s sportif le plus suivi de la planète après les JO et le Mondial de foot. Bic ne sponsorise pas d’équipe (elle l’a fait en son temps). Mais raccord avec son image populaire, elle a rejoint depuis deux ans, la caravane de la Grande Boucle. Une occasion unique de contacts directs et prolongés avec les fans pour distribuer échantillons et bons de réduction.

La sécurité n’est pas qu’un thème de lobbying chez Bic. C’est une religion et un efficace levier marketing. Bien vu pour un objet rempli de liquide inflammable souvent oublié au fond de la poche ou du sac. Le poussoir de la version électronique vous résiste ? C’est prévu, aucune petite main d’enfant ne jouera avec. C’est au nom de la sécurité que les briquets, même les grands, sont jetables et pas rechargeables, pour éviter les manipulations dangereuses. Made in Redon, en Bretagne, et Tarragone, en Espagne (pour tout le marché européen), les briquets subissent d’ailleurs plus de 50 contrôles qualité automatiques et individuels. Quel produit de luxe peut en dire autant ?